C'est un retour massif ? Les délocalisations n'étaient pas massives, les relocalisations ne le sont pas. Les chiffres manquent. En Allemagne, une entreprise sur cinq passées à l'Est a fait demi tour. Le phénomène n'est pas négligeable.
En quelques chiffres : en 2009
5% des délocalisations ont débouché sur une relocalisation, sachant que la délocalisation est en elle-même minoritaire.
3 à 4% de la production industrielle et des services est délocalisée.
Relocalisation : Changement d'implantation géographique de tout ou partie des activités d'une entreprise, notamment pour réduire les coûts de production, ou changement d'emplacement d'une administration, en particulier dans le cadre d'une décentralisation.
La prime à la relocalisation n'est-elle qu'un leurre ?
Le monde.fr - El Mouhoub Mouhoud professeur d'économie à l'université Paris-Dauphine, auteur de "Mondialisation et délocalisation des entreprises"
« Trois raisons motivent la relocalisation. D'abord, du côté de l'offre, les possibilités de remplacer le travail peu qualifié par les machines ou les robots. Ainsi, la part des coûts salariaux dans le coût d'assemblage des puces électroniques est passée de 30 % à 40 % dans les années 1970 à moins de 4 % dans les années 1980 grâce à la robotisation. Dans les secteurs à "matières solides", comme la mécanique, l'automobile ou l'électronique, il n'y a pas d'obstacle technique à la robotisation. En revanche, dans l'habillement ou la chaussure, lorsque les matières manipulées sont souples, le travail occupe encore près des deux tiers du coût total dans l'assemblage.
Ensuite, du côté de la demande, les problèmes de réponse à la variabilité des consommateurs, la nécessité de coller aux marchés et fabriquer des séries courtes de produits dont le cycle de vie ne dépasse pas trois à quatre semaines dans l'habillement par exemple, et les problèmes de qualité ou de sécurité des produits importés assemblés en Chine ou dans d'autres pays à bas salaires, consacrent les échecs de la délocalisation et impliquent souvent le retour dans le pays d'origine ou à proximité des marchés comme solution de survie.
Toutefois, beaucoup de firmes qui délocalisent sont des championnes de la logistique et de la réponse rapide à la demande tout en continuant à délocaliser la production dans les pays à bas salaires. Enfin, les problèmes de coûts de transport et de coûts de coordination liés à la distance géographique interviennent surtout dans les activités pondéreuses (le poids des composants compte) mais n'affectent que marginalement les produits légers (l'habillement) ou les services (les centres d'appel, la maintenance informatique...).
La plupart des entreprises qui ont décidé de relocaliser dans leur pays d'origine l'ont fait indépendamment des aides publiques, parce que leurs opérations de délocalisation furent un échec ou parce qu'elles ont décidé de remplacer le travail par l'automatisation pour bénéficier de la proximité des marchés ».