Comment lutter contre l'évasion fiscale ?

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johanono
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Comment lutter contre l'évasion fiscale ?

Message non lu par johanono » 04 avr. 2013, 21:19:32

L'affaire Cahuzac pose la question de savoir comment l'Etat français peut lutter contre l'évasion fiscale à destination, notamment, des paradis fiscaux. Dans un système de libre-échange mondialisé, il me semble techniquement assez difficile d'empêcher les capitaux de circuler d'un pays à l'autre. Toutefois, j'ai trouvé un article du monde assez intéressant :

(...) Nous proposons cinq mesures-clés qui permettraient aux autorités publiques de rompre clairement avec des années de négligence et de complaisance vis à vis de l'évasion et de la fraude fiscales.

En premier lieu, l'Etat doit embaucher sous 12 mois au moins 1 000 agents de contrôle fiscal pour renforcer les 5000 vérificateurs actuellement en poste. A en juger par le rendement de ces derniers, chacune des nouvelles recrues rapportera à l'État 2,3 millions d'euros par an grâce aux redressements fiscaux opérés, soit 40 fois le montant de son traitement.

En même temps, il faut prendre de réelles mesures contre l'évasion en commençant par l'établissement d'une liste crédible des paradis fiscaux, en lien avec les associations spécialisées, et en exigeant la communication de l'identité de tous les ressortissants français détenteurs de comptes à l'étranger, notamment mais pas seulement dans les paradis fiscaux.

On peut commencer par la Suisse, comme l'ont fait en 2010 les États-Unis auprès d'UBS, avant de généraliser la mesure avec la loi FATCA qui oblige tous les groupes bancaires opérant aux États-Unis, depuis début 2013, à communiquer sur demande du fisc américain les données concernant ses ressortissants. Ce précédent montre qu'il s'agit d'une simple question de volonté politique, présente aux États-Unis et inexistante jusqu'à aujourd'hui en France et en Europe.

Il conviendra ensuite de donner 12 mois aux banques opérant en France pour fermer leurs filiales dans ces territoires, sous menace de retrait de la licence bancaire sur le territoire français. Selon l'étude de référence du CCFD-Terre Solidaire, les banques françaises ont 527 filiales dans les paradis fiscaux, dont 360 pour la seule BNP Paribas ! La mesure récemment prise dans le cadre de la réforme bancaire, imposant aux banques la publication de leurs activités par pays, est positive mais encore insuffisante à cet égard, tout comme cette réforme elle-même, symbole de la démission du politique face au lobby bancaire.

Enfin c'est à l'ensemble des multinationales établies en France qu'il faut imposer le "reporting par pays". Accompagnée du renforcement des moyens de contrôle, cette transparence sur le chiffre d'affaires, les bénéfices et les impôts payés dans chaque pays sera un outil efficace pour mettre à jour les manipulations des prix de transfert entre filiales des multinationales et lutter contre l'évasion fiscale, laquelle permet à Total ou Google de ne payer quasiment aucun impôt sur les bénéfices.

(...)

http://www.lemonde.fr/idees/article/201 ... _3232.html


Dans une tribune, NDA reprend à son compte certaines de ces propositions :

http://www.debout-la-republique.fr/site ... _monde.pdf

Dans ces deux textes, il est notamment fait référence à une loi votée par le Congrès américain et obligeant tous les groupes bancaires opérant aux États-Unis à communiquer aux fisc américain les informations concernant ses ressortissants. Il serait tentant de vouloir transposer cette loi à la France, toutefois, je ne peux m'empêcher de me poser une question : cette loi ne risque-t-elle pas d'être jugée contraire au droit européen ?

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politicien
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Re: Comment lutter contre l'évasion fiscale ?

Message non lu par politicien » 07 avr. 2013, 21:00:58

Bonjour,
Le gouvernement tente, tant bien que mal, de reprendre la main après l'affaire Cahuzac. Ou, au minimum, de faire diversion. Le ministre de l'Économie a annoncé hier qu'il comptait proposer à ses homologues européens des mesures pour mieux s'organiser pour lutter contre la fraude fiscale. «Je propose qu'il y ait un échange d'informations automatique», a expliqué Pierre Moscovici lors du «Grand rendez-vous Europe 1-Le Parisien-iTélé». Il compte élaborer un «Fatca européen», en référence à la loi américaine en cours de déploiement . La France fera également avec l'Allemagne une proposition sur le blanchiment d'argent. «Nous prendrons dans les prochains jours une position commune pour que l'on aille très loin en la matière», a assuré le ministre.

En dehors de ces intentions qui restent à concrétiser, Moscovici a campé sur la même ligne de défense. «J'ai fait tout ce que j'ai pu, tout ce que j'ai dû», a redit l'ex-ministre de tutelle de Jérôme Cahuzac. Il a assuré que lui-même et les services fiscaux ne pouvaient pas avoir plus d'informations sur les comptes cachés suisse et singapourien de son collègue du gouvernement: «Si j'avais demandé tout le reste, je serais sorti des capacités qui étaient les miennes (…) et les Suisses n'auraient pas répondu».

La France n'est pas la seule, en Europe, à promettre des efforts supplémentaires dans la lutte contre l'évasion fiscale. Et pour cause. D'Italie en Espagne, en passant par la Grèce, les gouvernements paient l'un après l'autre le prix de la défiance des électeurs, écœurés par la fraude. Le cocktail politique entre austérité, pour la plupart des contribuables, et évasion à grande échelle, pour une poignée d'autres, devient détonant. Fera-t-il pour autant basculer l'UE vers plus de transparence fiscale? Il en faudra sans doute davantage. Plus d'un demi-siècle après le traité de Rome, l'impôt reste une prérogative absolue de souveraineté nationale, comme la défense nationale. En pratique, aucune avancée n'est possible sans unanimité.

(...)

Il a fallu attendre la fin 2010 pour que les 27 s'entendent pour des échanges automatiques d'information sur décision de justice, en clair contre les fraudeurs convaincus. L'Autriche et jusqu'à dimanche semble-t-il le Luxembourg se sont toujours opposés à cet échange en cas de simple présomption. Résultat: faute d'Europe, chacun négocie avec son voisin, ajoutant à la fragmentation d'un tableau toujours plus compliqué. L'UE reste d'ailleurs sans liste noire, ni définition de ce qu'est un paradis fiscal.

(...)

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Re: Comment lutter contre l'évasion fiscale ?

Message non lu par Narbonne » 07 avr. 2013, 21:13:22

Depuis 2001, les US ont une copie systématique de l'ensemble des virements internationaux qui transitent par le réseau informatique swift.

liste des codes swift des banques situées sur les iles caimans

Iles caïmans : 45 000 habitants
Il y a, bien sur, d'autres façons de proceder.
Ils ne savaient pas que c'était impossible, alors ils l'ont fait.

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johanono
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Re: Comment lutter contre l'évasion fiscale ?

Message non lu par johanono » 08 avr. 2013, 13:49:34

Évasion fiscale: comment les États-Unis recoupent les données

La loi Fatca, adoptée en 2010, oblige les banques étrangères qui ont des clients américains à rendre compte directement à l'IRS des avoirs de leurs clients.

Le fisc américain (Internal Revenue Service, IRS) estime que l'évasion fiscale de la part de contribuables des États-Unis représente plus de 300 milliards de dollars de recettes perdues. L'impératif de réduction du déficit budgétaire, autant que l'aveu par les banques suisses comme UBS et Wegelin & Co. du recrutement passé de milliers clients américains dans le but de cacher une partie de leur fortune, ont poussé le Congrès à imaginer un nouveau moyen de combattre l'évasion fiscale, dont Pierre Moscovici entend s'inspirer pour contrer l'évasion fiscale en Europe.
Une loi baptisée Fatca

Cette loi, adoptée en 2010 et baptisée Fatca pour Foreign Account Tax Compliance Act, oblige les banques étrangères qui ont des clients américains à rendre compte directement à l'IRS des avoirs de leurs clients. Des pénalités très dissuasives sont prévues pour les établissements qui ne se plieraient pas à la règle: une retenue à la source de 30% sera appliquée par l'IRS sur leurs revenus en provenance des États-Unis.

L'Américain moyen n'a jamais entendu parler du Fatca. Les principaux visés - dans un système fiscal essentiellement lié à la nationalité, alors que le lieu de résidence est l'élément prédominant dans la plupart des autres législations à travers le monde - sont les quatre millions d'Américains qui vivent à l'étranger. Même s'ils payent leurs impôts dans leur pays de résidence, ils étaient déjà obligés de remplir une longue déclaration de revenus à l'IRS tous les ans. Ils devaient aussi faire part au Trésor de leurs comptes bancaires à l'étranger s'ils contiennent plus de 10.000 dollars - mais l'information ainsi recueillie ne visait qu'à lutter contre le blanchiment d'argent; à ce titre, elle n'était pas communiquée à l'IRS…

Avec la loi Fatca, ces expatriés seront désormais obligés de remplir un deuxième formulaire détaillant leurs actifs en dehors des États-Unis. Objectif: recouper ces données avec celles que devront délivrer les banques étrangères, pour débusquer les éventuels menteurs… Et gare à ceux qui chercheraient à s'exonérer de cette complication supplémentaire: ils risquent une amende d'au moins 10.000 dollars. Une pénalité de 40% du montant de leurs actifs non déclarés vient en outre frapper les coupables d'évasion fiscale.

Cette disposition, extrêmement lourde à gérer, a choqué certains gouvernements étrangers qui y ont vu une forme «d'impérialisme financier américain». Les banques étrangères ont demandé des aménagements, ce qui retarde l'entrée en vigueur de la loi. Son entière application a été différée à 2014.

suite

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Re: Comment lutter contre l'évasion fiscale ?

Message non lu par phoenix72 » 08 avr. 2013, 14:43:42

[scribd]Gabriel Zucman: « il faut s'attaquer aux paradis fiscaux »
05 AVRIL 2013 | PAR LUDOVIC LAMANT
Gabriel Zucman, doctorant à l'École d'économie de Paris, est spécialiste des paradis fiscaux. Il est l'auteur d'une étude retentissante, publiée en 2011, sur « la richesse manquante des Nations », dans laquelle il chiffrait à 6 000 milliards d'euros le montant des placements des ménages dans les paradis fiscaux (lire sous l'onglet Prolonger). Dans un entretien à Mediapart, cet économiste exhorte François Hollande à « prendre le leadership d'une coalition de pays européens » pour en finir avec le secret bancaire en Suisse et dans d'autres paradis fiscaux : « C'est la seule réponse raisonnable à l'affaire Cahuzac », juge-t-il.

L'affaire Cahuzac montre-t-elle une évolution de la Suisse en matière de secret bancaire ?
Non. S'il n'y avait pas eu l'enregistrement sur un téléphone portable de la voix de Jérôme Cahuzac, que Mediapart a diffusé, l'existence du compte n'aurait jamais été révélée. Le secret bancaire suisse reste intact, hormis ces cas exceptionnels.
Quand Pierre Moscovici, ministre de l'économie, a fait jouer le traité d'échange d'information à la demande, entre la Suisse et la France, en janvier, il semble qu'on lui ait répondu par la négative. Alors que le compte existait bien. C'est la preuve que ces traités « à la demande » ne servent à rien, puisqu'il faut quasiment avoir la réponse à sa question pour correctement formuler la question en amont...

Que retenez-vous de l'affaire Cahuzac ?
Elle prouve que le problème de l'évasion fiscale est majeur. Or, la solution à ce problème est très simple : il faut mettre en place un échange automatique d'information avec les banques installées dans les paradis fiscaux.
À l'intérieur d'un pays comme la France, cet échange automatique fonctionne très bien. Si je touche de l'argent sur mon compte, Bercy est au courant : ce sera pré-rempli sur ma feuille d'impôts. Il suffit d'élargir ce mécanisme à l'échelle internationale pour que les paradis fiscaux disparaissent. Techniquement, c'est très simple.

Problème majeur, solution très simple : il faut désormais mettre le pouvoir français face à ses contradictions. Est-il prêt à prendre le leadership d'une coalition de pays européens pour forcer la Suisse et d'autres paradis fiscaux à abandonner ce secret bancaire ? C'est la seule réponse raisonnable, à mes yeux, à l'affaire Cahuzac.

À quoi pensez-vous ?
François Hollande doit se lancer dans une tournée des capitales européennes. Il doit expliquer à ses homologues qu'il n'avait aucune technique à sa disposition pour savoir que son ministre du budget disposait d'un compte en Suisse. Une fois constituée, cette coalition doit faire pression, et menacer les paradis fiscaux de sanctions. La Suisse, face aux menaces conjointes de l'Allemagne et la France, pliera. Le Luxembourg aussi. Ensuite, il faudra élargir la coalition pour l'Asie.

Toute autre réponse à l'affaire Cahuzac serait choquante. Penser que faire voter de nouvelles lois en France résoudra le problème est une erreur. C'est même un écran de fumée, une mascarade. C'est se moquer du peuple. Au XXIe siècle, la lutte contre les paradis fiscaux ne passe pas par de nouvelles lois pour le territoire français – il faut construire des rapports de force à l'international.

Quelles sanctions imaginez-vous pour faire bouger la Suisse ?
Par exemple retirer la licence bancaire des banques suisses en France ou en Allemagne.

C'est ce qu'ont menacé de faire les États-Unis avec UBS en 2009.
Oui, et cela a fonctionné : UBS a fini par fournir sa liste de clients aux autorités américaines. On peut aussi imaginer que l'on menace de fermer nos frontières avec la Suisse. De toutes les façons, les banques suisses ne peuvent pas se permettre de perdre leur accès aux marchés français ou allemands.

La lutte contre les paradis fiscaux est une priorité depuis 2009, portée par le G-20 et l'OCDE, et les résultats sont quasiment invisibles. Ce n'est donc pas si simple à mettre en place, quel que soit votre volontarisme...
G-20, OCDE, Union européenne : ces enceintes ne sont pas le bon cadre. On trouvera toujours des pays qui bloqueront la dynamique pour préserver leurs intérêts. Il faut donc en sortir et bâtir une coalition appropriée. Ne serait-ce qu'une position commune de la France et de l'Allemagne suffirait pour faire bouger les choses. Il suffit que François Hollande se rende à Berlin. C'est aussi simple que cela.
« Il existe des richesses privées énormes, qui sont taxables »
Jean-Jacques Augier, l'ex-trésorier de la campagne de François Hollande dont on a appris qu'il était actionnaire de deux sociétés basées dans les îles Caïmans, se défend de toute illégalité. Qu'en pensez-vous ?
Je ne veux pas me prononcer sur un cas particulier que je ne connais pas. Mais la distinction entre ce qui est légal et ce qui ne l'est pas est très claire. Il est légal d'avoir un compte à l'étranger, par exemple en Suisse. Il est illégal de ne pas reporter sur sa feuille d'impôts l'existence de ce compte et les revenus qu'il génère.

Venons-en aux ordres de grandeur que vous avez mis au jour dans vos travaux. Vous chiffrez à 8 % la proportion du patrimoine financier des ménages placée dans les paradis fiscaux – soit environ 6 000 milliards d'euros. Une étude publiée en juillet 2012, réalisée par James Henry, ex-économiste en chef pour le cabinet McKinsey, évoque le chiffre de 26 000 milliards d'euros. Que vous inspire cet écart ?
Voici ma méthode. Après interprétation des données de la banque centrale suisse, il apparaît que le patrimoine placé en Suisse s'établit à 2 000 milliards d'euros environ. Ensuite, à partir d'une analyse exhaustive des bilans internationaux des pays, je calcule qu’il y a à peu près 6 000 milliards dans l’ensemble des paradis fiscaux – la Suisse abrite donc environ un tiers du total.

Il y a bien sûr de l'incertitude dans ce genre d'estimations. Et je suis peut-être en dessous de la réalité. Mais concernant l'étude de James Henry, qui s'appuie sur les déclarations des banques d'affaires, j'ai tendance à penser que ces établissements sont enclins à compter plusieurs fois le même euro, placé en Suisse, au Luxembourg et au Panama.

Quoi qu'il en soit, dans les deux cas, les chiffres sont suffisamment énormes pour qu'il faille faire de la question de l'évasion fiscale une priorité de nos politiques publiques.

Vous laissez entendre dans vos travaux qu'en France, la proportion serait supérieure à ces fameux 8 %. Pourquoi ?
Il est plus facile d'établir un chiffrage global, qu'un chiffre pays par pays. Appliqués à la France, ces 8 % représentent entre 200 et 250 milliards d'euros. Mais ces 8 % me semblent effectivement une hypothèse conservatrice. J'ai tendance à penser que les Européens en général placent davantage leurs fortunes dans des comptes offshore que les Japonais ou les Américains. Or, ces 8 % sont bien une moyenne internationale.

Pourquoi ?
Au Japon, la fiscalité sur le patrimoine est très faible. Aux États-Unis, comme dans les pays anglo-saxons en général, les gens fortunés privilégient une autre technique d'évasion fiscale, qui passe par les mécanismes de trusts et de fiducie.

Dans tous les cas, puisque cette richesse échappe aux statistiques officielles, cela veut bien dire que les riches sont encore plus riches qu'on ne le pense.
Oui. Cela confirme la fragilité de certaines statistiques sur la mesure de la richesse. On se rend compte, en cette période où l'on nous dit que nos dettes publiques sont énormes, qu'il existe aussi des richesses privées énormes, qui sont taxables.

[/scribd]

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johanono
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Re: Comment lutter contre l'évasion fiscale ?

Message non lu par johanono » 09 avr. 2013, 21:03:50

Voici quelques autres idées :
"Il faut établir un délit de fraude fiscale en bande organisée"

Par Laurent Martinet - publié le 09/04/2013 à 18:21

Antoine Peillon, auteur de Ces 600 milliards qui manquent à la France (Seuil), nous parle des moyens dont dispose réellement la France pour lutter contre l'évasion fiscale.

Haro sur l'évasion fiscale. Depuis que l'ex-ministre du budget Jérôme Cahuzac a reconnu détenir un compte en Suisse, il est devenu le symbole du coût de celle-ci pour l'Etat. L'évasion fiscale creuserait chaque année un trou de 60 à 80 milliards d'euros dans les caisses, à comparer au déficit public de la France, de 98 milliards d'euros en 2012. Alors que les hommes politiques se mettent à publier leur patrimoine, que le gouvernement veut moraliser la vie politique, Pierre Moscovici, l'ancien ministre de tutelle de Jérôme Cahuzac, a proposé de mettre en place une loi Fatca à l'américaine pour contraindre toutes les banques de l'union européenne à communiquer les informations sur leurs clients. Le journaliste Antoine Peillon, spécialiste de l'évasion fiscale, auteur de Ces 600 milliards qui manquent à la France (Seuil), nous donne son avis.

Pierre Moscovici préconise une loi Fatca européenne pour lutter contre l'évasion fiscale. Est-ce la solution?

Oui, c'est une bonne idée. Parce que c'est aussi une idée violente, impérialiste, qui signifie qu'on ne peut lutter contre l'évasion fiscale sans lui déclarer la guerre, comme le font les Etats-Unis avec leur Foreign Account Tax Compliance Act. L'évasion fiscale oppose un Etat à un autre, c'est une véritable guerre dont il faut se donner les moyens.

Pourquoi la France n'a-t-elle pas encore signé l'accord Fatca?

Peut-être s'agit-il de protéger certaines banques, qui ne seraient pas très propres? Dans ce domaine, on est toujours le paradis fiscal de quelqu'un d'autre. Chaque Etat défend ses propres intérêts. Parce que l'évasion fiscale, qui concentre 10% de la richesse mondiale, n'est jamais qu'un outil pour faire de belles affaires.

Pensez-vous que la volonté politique de lutter contre l'évasion fiscale soit bien présente?

Je pense qu'elle est présente dans le gouvernement Ayrault. Mais cela ne suffira pas. Il faudrait une prise de conscience plus large. L'évasion fiscale, qui met notre budget en danger, est un véritable problème républicain. On le voit bien avec l'affaire Cahuzac, ce sont les mêmes banques, les mêmes conseillers qui travaillent pour des hommes politiques de droite comme de gauche. L'évasion fiscale a longtemps été au coeur du financement des partis politiques, tout le monde en a profité.

Qu'est-il possible de faire aujourd'hui contre l'évasion fiscale?

Il faut se reporter au formidable travail du magistrat Charles Prats. Il propose de réformer le cadre des investigations au niveau national. Il s'agirait d'établir un délit de fraude fiscale en bande organisée, d'étendre l'obligation de déclaration des comptes bancaires à l'étranger à l'ensemble des personnes physiques et morales, de protéger les lanceurs d'alerte, de supprimer la commission des infractions fiscales, la CIF, qui est un filtre inutile. Cet ensemble de suggestions forme une proposition de loi clé en main pour le Parlement. Il n'y a plus qu'à.
http://lexpansion.lexpress.fr/economie/ ... 79430.html

Il est encore question de cette fameuse loi FATCA.

Sur le délit de fraude fiscale en bande organisée, je suis réservé : sans doute est-ce une bonne idée, mais le problème, en France, c'est qu'on a du mal à appliquer nos lois, alors si on instaure un délit qu'on ne peut pas sanctionner en pratique, cela ne servira à rien.

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Re: Comment lutter contre l'évasion fiscale ?

Message non lu par El Fredo » 09 avr. 2013, 22:53:11

Justement ça permettra aux magistrats de qualifier des délits qu'ils ont le plus grand mal à poursuivre actuellement.
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Re: Comment lutter contre l'évasion fiscale ?

Message non lu par Adeline » 10 avr. 2013, 09:02:22

Et moins taxer, pour moins tenter l'évasion ?
Je suis peut être trop terre à terre, mais prenons la Belgique qui récupère une partie de nos fortunés. Ce pays a une taxation visiblement raisonnable pour les riches et ce pays ne semble pas ruiné, alors ? ;)

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Re: Comment lutter contre l'évasion fiscale ?

Message non lu par El Fredo » 10 avr. 2013, 09:34:59

Adeline a écrit :Et moins taxer, pour moins tenter l'évasion ?
Je suis peut être trop terre à terre, mais prenons la Belgique qui récupère une partie de nos fortunés. Ce pays a une taxation visiblement raisonnable pour les riches et ce pays ne semble pas ruiné, alors ? ;)
Parce que quel que soit le niveau de taxation, il y en aura toujours un qui proposera moins. C'est un jeu à somme nulle : les riches qui vont en Belgique sont partis d'ailleurs. On ne peut pas tous gagner en même temps.

Et puis la Belgique a fait le choix d'épargner les riches en matraquant leur classe moyenne.
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Re: Comment lutter contre l'évasion fiscale ?

Message non lu par Adeline » 10 avr. 2013, 10:51:25

Je ne crois pas El frédo. Je connais de nombreux Belges, ils ne se plaignent pas et au contraire, ils ne pigent pas le fonctionnement de ce gouvernement qui fait fuir les investisseurs, au lieu de veiller à les garder pour ce qu'ils apportent.

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Re: Comment lutter contre l'évasion fiscale ?

Message non lu par El Fredo » 10 avr. 2013, 11:20:34

J'avais posté un article là-dessus il y a quelque temps, d'après un fiscaliste les classes moyennes sont beaucoup plus imposées en Belgique qu'en France.
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Re: Comment lutter contre l'évasion fiscale ?

Message non lu par Nombrilist » 10 avr. 2013, 19:42:24

Il faut être français pour ne pas le savoir. Bien sur que les vrais belges envient le niveau d'imposition des français. Ils sont bien plus imposés que nous. La Belgique est un paradis fiscal pour les riches étrangers, c'est tout.

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Re: Comment lutter contre l'évasion fiscale ?

Message non lu par politicien » 10 avr. 2013, 22:49:50

Bonjour,
"Nous allons nous mobiliser contre les paradis fiscaux." Une semaine après les aveux de Jérôme Cahuzac sur l'existence de son compte en Suisse, François Hollande a tenté de reprendre la main, mercredi, en annonçant non seulement des mesures de moralisation de la vie politique, mais aussi des mesures de fond pour lutter contre la fraude fiscale internationale.

Dans une intervention solennelle, le président, dont le trésorier de campagne n'a pas hésité à utiliser des sociétés-écrans installées aux îles Caïmans pour porter ses investissements en Chine, a détaillé les mesures qu'il comptait prendre pour s'attaquer à ces juridictions qui utilisent le levier de la fiscalité pour attirer les capitaux et protègent le secret bancaire. Une bonne occasion de réincarner le François Hollande du Bourget, celui qui avait promis de lutter contre la finance "sans visage" dans un meeting électoral considéré comme un tournant dans la campagne.

Une mesure déjà prise
"Première décision, a détaillé le chef de l'État, les banques françaises devront rendre publique, chaque année, la liste de toutes leurs filiales, partout dans le monde, et pays par pays. Elles devront indiquer la nature de leurs activités. En d'autres termes, il ne sera pas possible pour une banque de dissimuler les transactions effectuées dans un paradis fiscal. L'ensemble de ces informations seront publiques et à la disposition de tous."

Sauf que cette mesure était déjà dans les tuyaux, imposée par l'adoption d'un amendement à la loi bancaire, lors de son examen en première lecture, notamment au palais du Luxembourg, fin mars. Le texte validé par les sénateurs prévoit en effet la publication pour "chaque État ou chaque territoire" du "nom des implantations et nature d'activité", de l'équivalent du chiffre d'affaires des banques ; de leurs effectifs ; de leurs bénéfices avant impôt et du montant total de leurs impôts ainsi que de leurs subventions publiques.

(...)

L'intégralité de cet article à lire sur Le Point.fr
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Re: Comment lutter contre l'évasion fiscale ?

Message non lu par politicien » 13 avr. 2013, 23:33:21

Bonjour,
Les grandes entreprises vont-elles dans les paradis fiscaux seulement pour payer moins d'impôt? « Le sujet est très différent pour les entreprises et les personnes physiques, affirme le directeur fiscal d'une grande entreprise américaine. Les particuliers ouvrent en général un compte dans un paradis fiscal pour y cacher de l'argent. Dans les grandes entreprises, surtout cotées, c'est tout l'inverse. Le "pas-vu-pas-pris" n'existe pas. »

La fiscalité accommodante joue, bien sûr, un rôle central. Mais pas seulement. Les raisons qui poussent les entreprises à baser certaines activités ou à faire transiter certaines opérations par des paradis fiscaux sont en réalité multiples. « Les paradis fiscaux aujourd'hui sont utilisés pour un type d'activité ou de revenu, spécifique, pour lesquels l'entreprise va chercher le régime le plus favorable, poursuit un expert. La fiscalité est alors prise en compte comme tous les autres paramètres entrant dans la composition des coûts ». Souvent, une réglementation plus accommodante dans le pays choisi entre aussi en ligne de compte, de même que des coûts de financements moins élevés. « Ce peut être parce que dans tel pays, on finance des opérations en demandant moins d'autorisations de crédit qu'en France », poursuit cet expert. Ou parce que les entreprises peuvent exercer des activités de crédit bail sans licence bancaire par exemple. Ou encore y trouver des procédures moins lourdes, pour l'enregistrement des avions, ou des bateaux.

Aux îles Caïmans, sixième place financière mondiale, les grandes banques spécialisées dans le financement aéronautique sont présentes. « Les institutions gouvernementales comme les agences de crédit export européennes (Coface, EGCD, Hermes et Sace) reconnaissent et facilitent l'utilisation des îles Caïmans, par exemple dans la restructuration de financements aéronautiques», explique une banque française. A Guernesey et Jersey, autres îles britanniques, la législation est particulièrement favorable à la gestion de fonds. Depuis vingt ans, l'ensemble des professionnels spécialisés dans ce secteur (juristes, dépositaires, administrateurs, comptables) y sont ainsi implantés.

(...)
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artragis
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Re: Comment lutter contre l'évasion fiscale ?

Message non lu par artragis » 16 avr. 2013, 08:51:28

"Comment j'ai ouvert un compte numéroté au Liechtenstein en 13 minutes" : le titre de l’article paru ce matin sur le site d’Alternatives économiques dit (presque) tout. Manuel Domergue, son auteur, a voulu démontrer combien l’évasion fiscale était aisée. Et il y parvient avec efficacité.
Après une recherche via un moteur de recherches, Domergue tombe rapidement sur un cabinet conseil spécialisé dans les paradis fiscaux nationaux et internationaux. Il contacte ce cabinet en inventant une histoire d’héritage, près "d’un million d’euros placés illégalement par son défunt père à Jersey". Ni une ni deux, le cabinet basé en Angleterre rappelle notre journaliste et lui propose "en toute discrétion d’ouvrir un compte bancaire numéroté au Liechtenstein" et, bien sûr, d’écarter la piste d’une déclaration au fisc français pour régulariser la situation.
http://www.arretsurimages.net/vite.php?id=15425
http://zestedesavoir.com une association pour la beauté du zeste.

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