B/ Le réarmement de la production française
La France a des atouts plus nombreux qu’aucun des pays qui sont nos partenaires en Europe. Nous sommes au cœur de l’Europe qui est le premier marché du monde. Nous disposons d’une épargne abondante (plusieurs milliers de milliards d’euros de stock, un taux d’épargne de 17 %). Nous avons équipé le pays d’infrastructures exceptionnelles. Nous avons la meilleure démographie des pays comparables et c’est une chance à défendre. Nous avons donc des jeunes pleins d’énergie. Nous avons sur notre sol des leaders industriels mondiaux. Parmi nous une diversité d’origines, particulièrement parmi les jeunes qui, si on la regarde bien, nous relie à toutes les grandes régions du monde où se joue la croissance de demain.
Et pourtant la France est aujourd’hui déprimée. Elle se vit comme assiégée.
Il faut lui rendre une stratégie pour l’activité, pour l’emploi, pour la richesse nationale. Et cette stratégie ne peut être fondée que sur le « Produire en France ». Bien sûr pour satisfaire la demande nationale que nous ne savons plus couvrir. Mais aussi pour satisfaire aux immenses opportunités qui s’annoncent avec la montée en force des classes moyennes dans les pays émergents. Déjà 600 millions de femmes et d’hommes aujourd’hui, ce sera 2 milliards dans dix ans, 3 milliards en 2030, qui aspirent à consommer mieux, à voyager, à habiter des villes durables si nous savons les construire. Autant d’opportunités pour nos industries d’excellence (dans le luxe ou l’aéronautique, dans les hautes technologies), pour notre agriculture avec ses productions de qualité, pour notre secteur touristique ou pour nos grands groupes de services urbains. Ce sont ces classes moyennes des pays émergents qui vont tirer la croissance mondiale dans les années à venir. D’ici 2030, en moins de deux décennies, la taille de l’économie mondiale va plus que doubler. De cette dynamique, la France doit avoir sa juste part.
5- Architecte de ce mouvement : un commissariat national aux stratégies.
J'ai beaucoup d'admiration pour ce que le commissariat au plan a accompli au début de la Ve République. Le travail qui fut confié autrefois au Commissariat au Plan est plus nécessaire que jamais. Un pays confronté aux défis qui sont les nôtres a besoin de faire travailler ensemble tous les acteurs de son redressement. Ce Commissariat national aux stratégies doit être placé auprès du Président de la République et dirigé par une personnalité de grande autorité.
6- Mise en réseau des grandes entreprises et des PME
Les grandes entreprises ont la maîtrise des processus de fabrication, des brevets, de la recherche appliquée, de grands réseaux commerciaux, les PME ont la capacité d’innovation. Une récente étude de l'OCDE montre que la création d'emplois se fait pratiquement uniquement dans les PME. Incitation par la création d’un avantage fiscal lorsqu’une grande entreprise aura créé une structure d’investissement en direction des PME ou pris une participation dans une telle structure.
7- un soutien au financement par la création d’une ou plusieurs banques d’économie mixte décentralisées de soutien aux PME
Cette idée avance dans tous les programmes. Je l'ai vu reprise sous des formes différentes dans les discours de François Hollande et de Nicolas Sarkozy. Il est des besoins de financement, notamment en fonds propres, qui ne sont pas pris en compte aujourd’hui. Mais il est capital que cette structure soit décentralisée, qu’elle associe les collectivités locales à son action et qu’elle ne soit pas sous le seul contrôle de l’État. De tels établissements bancaires peuvent être soit organisés sur une base géographique, soit spécialisés sectoriellement (par exemple pour l’économie numérique). Ces banques pourront faire appel à des actionnaires nouveaux (type assurance-vie)
8- création d’un livret d’épargne industrie
Il est besoin non seulement d’établissements mais de ressources nouvelles dédiées.
9- négociation nationale autour de la rénovation du climat social dans l’entreprise
Ce sujet est crucial. L’adaptation de l’entreprise à son environnement, à la conjoncture, exige l’association et la participation des salariés et de leurs organisations syndicales à la réflexion stratégique dans l’entreprise. La guerre froide sociale est un facteur de blocage. J’organiserai une négociation nationale entre partenaires sociaux sur ce thème, dont l’État sera facilitateur, mais dont il ne sera pas décideur. J’ai en effet décidé de sortir du blocage qui vient de la posture de l’État dont tout le monde sait qu’il interviendra en fin de compte.
10- Pour faire bouger les choses, la participation : les salariés au Conseil d’administration des entreprises avec droit de vote
La culture de la cogestion est bienfaisante. C'est mon affirmation, et telle est une des principales raisons du retard français par rapport à la réactivité du tissu économique allemand. C’est d’ailleurs l’inspiration même qui fut celle du général de Gaulle lorsqu’il plaidait, à l'époque difficilement, la participation. Non seulement participation aux résultats, mais participation à la stratégie et à la décision. Nous ferons entrer dans les entreprises de plus de 500 salariés d’abord les représentants des salariés dans les conseils d’administration des entreprises avec droit de vote.
11- La participation par la négociation au sein des Comités d’entreprise
Les comités d’entreprise sont déjà le lieu légal et obligatoire de l’information et de la consultation des représentants des salariés sur la vie de l’entreprise. Il faut étendre leur rôle à la négociation continue des conditions de travail et des rémunérations.
12- La négociation d’accords particuliers au sein de l’entreprise soumise à des accords cadres dans les branches.
Nicolas Sarkozy a annoncé que des accords majoritaires dans les entreprises pourraient s’imposer aux salariés minoritaires. Le risque est grand, à mes yeux, que cette possibilité, ouverte sans précaution, se révèle contraire aux principes constitutionnels. Il est encore plus grand que des pressions à l’intérieur des petites entreprises rendent ce dispositif choquant et inquiétant. Il faut donc que faute d’unanimité, de tels accords soient encadrés par des accords cadres fixant, dans les branches, le cahier des charges de ces négociations et les marges admissibles des évolutions envisageables.
13- Un crédit d’impôt innovation à l’image du crédit d’impôt-recherche et un encouragement au lien PME-universités.
On peut imaginer que des PME pourraient faire appel à des laboratoires d'universités. La recherche est une donnée clé. Mais l’innovation, dans les processus de fabrication, dans le design est au moins aussi importante, notamment dans les PME. Je proposerai la création d’un crédit d’impôt innovation, parallèle au crédit impôt recherche.
14- Un statut pour les Business-angels à l’image des fonds de private equity
Dans le monde des entreprises innovantes, il existe une disparité très grande entre les avantages consentis aux fonds de private equity, dont les intérêts d’acquisition sont fiscalement déductibles et les Business angels, qui soutiennent des créations de start-up, ne reçoivent aucun avantage fiscal équivalent. Il faut donc leur permettre pendant les premières années de leur investissement de déduire les pertes éventuelles de ces entreprises en développement de leur propre revenu imposable, au moins partiellement.
15- L’association des consommateurs : la création d’un label indépendant
Plus de 60 % des consommateurs français souhaitent soutenir la production dans notre pays, que cette production soit le fait d’entreprises françaises ou d’entreprises à capitaux étrangers installées en France. Mais pour l’instant il est impossible pour l’immense majorité des produits de connaître la provenance, ou la part française dans le produit considéré. Or il y aura là, pour les industriels, un avantage compétitif qui peut être déterminant pour inciter les industriels à leur installation dans le pays.
16- Développer l’image de marque du « produit en France »
Quand les produits français ne sont pas choisis par les consommateurs nationaux, européens ou étrangers, c’est souvent, à prix égal, parce que l’image de marque de nos productions n’est pas suffisante. Nos concurrents, surtout allemands, sont considérés comme plus fiables, plus durables, même si la réalité ne confirme pas cette réputation. Il faut donc entreprendre un travail en profondeur sur l’image de marque de la France en tant que pays producteur.