En fait, on s'aperçoit que Debré a la nostalgie d'une pratique très ancienne sous la Ve République : celle des "députés-godillots", c'est-à-dire des députés de la majorité qui se contentent d'obéir au gouvernement en votant tout ce que le gouvernement leur demande de voter. Fatalement, quand on a cette conception de la vie parlementaire, on a du mal à comprendre que des députés pourtant issus de la majorité puissent se rebeller en refusant de voter certains projets de loi présentés par le gouvernement...Devant les députés PS, Jean-Louis Debré défend Hollande et critique les frondeurs
LE SCAN POLITIQUE - Invité du groupe PS au palais Bourbon, l'ancien président du Conseil constitutionnel a prédit la disparition des députés frondeurs du PS s'ils persistaient à vouloir déstabiliser l'exécutif.
Une scène étrange et passée inaperçue s'est déroulée mercredi 6 avril à l'Assemblée nationale. Cordialement détesté à gauche lorsqu'il était député, puis ministre, Jean-Louis Debré a reçu les honneurs du groupe socialiste, raconte Challenges ce lundi. «Chaque semaine nous invitons une personnalité, un intellectuel, un politique. Jean-Louis Debré venait de quitter ses fonctions au Conseil constitutionnel, et avoir son regard sur la vie politique actuelle nous a semblé intéressant», confirme au Scan un proche de Bruno Le Roux. Et pour marquer l'occasion, l'ancien président de l'Assemblée s'est adonné à un exercice qui a dû ravir le patron des députés PS: critiquer vertement l'attitude des frondeurs qui mettent à mal, selon lui, les institutions de la Ve République.
Fort du vocabulaire soutenu qu'on lui connaît, Jean-Louis Debré n'a pas hésité à qualifier Christian Paul et ses soutiens «d'iconoclastes inconscients», ou encore de «flibustiers de carnaval». Aux yeux de ce fidèle chiraquien, le mouvement dit de «la fronde» des parlementaires socialistes, né en avril 2013, relève d'une «guérilla infantile» contre François Hollande. Ces députés récalcitrants à voter les orientations du gouvernement tentent, selon lui, d'exister par la critique au risque de déstabiliser le régime. «C'est scandaleux d'avoir détruit par des jeux politiciens incompréhensibles ses efforts d'union autour de la déchéance nationale», a brocardé l'ancien président du Conseil constitutionnel. «C'est scandaleux, de prétendre conditionner la réélection de François Hollande à des primaires alors que, président sortant, il bénéficie d'une légitimité incontestable», a renchéri ce fervent défenseur du régime présidentiel.
suite
Le problème, c'est que Hollande s'est affaibli lui-même en menant une politique pour laquelle il n'a pas été élu, ce qui a suscité une grande amertume chez de nombreux électeurs de gauche. Les frondeurs ne sont que l'expression de cette amertume. Il est dommage que Debré ne l'ait pas compris.