Voici un billet de J. Attali :
Qu'en pensez vous ?Depuis des années, les élites politiques françaises jouent avec le feu ; cela pourrait se terminer très mal : une crise de régime n’est pas improbable. Et pour la conjurer, sans doute vaut-il la peine de la raconter, telle qu’elle pourrait se dérouler, telle qu’elle se prépare ; telle qu’elle s’annonce :
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Aujourd’hui, alors que le gouvernement de Manuel Valls ose enfin, un peu à la sauvette, annoncer 50 milliards d’économies, la classe politique dans son ensemble est comme frappée de stupeur. Le Parlement, écarté depuis des années de la réflexion sur la nature de la crise et sur les décisions à prendre, est comme atteint de sidération.
Devant ce déni de réalité, la majorité parlementaire pourrait, à un moment ou un autre, refuser de voter un des textes qui s’annoncent: soit le pacte de responsabilité ; soit le collectif portant sur des économies à faire dès le budget 2014 ; ou, pire encore, en novembre, le budget 2015. D’autant plus que, d’ici là, on apprendra que les 50 milliards d’économies annoncées la semaine dernière (et pas encore clairement identifiés) supposent d’énormes réformes de structure de l’hôpital et des autres services publics, et qu’ils vont toucher au cœur des classes moyennes ; et qu’on découvrira qu’il faudra en fait en trouver, dans les trois ans, plusieurs dizaines de milliards de plus pour éviter le dérapage de la dette publique.
Si cette majorité refuse de voter ces économies, inévitablement impopulaires parce que non expliquées, et si des blocs suffisants de l’opposition ne viennent pas la suppléer, un de ces textes essentiels, incontournables, ne pourra etre voté que par l’utilisation par le gouvernement de l’article 49/3 de la Constitution, qui conduit au vote bloqué du texte en engageant la responsabilité du gouvernement. Malgré cette menace, les Verts et une partie de la gauche de la gauche pourraient refuser de se rallier et préférer un rejet du texte à la défense de la majorité en place. Cela conduirait au renversement du gouvernement, suivi inéluctablement de la dissolution de l’Assemblée Nationale. La droite, qui emporterait les élections suivantes en un raz de marée, devrait alors répondre à la sollicitation du Président de la République et designer l’un des siens pour prendre la charge du gouvernement. Elle ne le fera sans doute pas, comme l’ont déjà annoncé plusieurs dirigeants importants de l’UMP ; son groupe parlementaire refusera la confiance à tout gouvernement que le Président pourrait nommer, qu’il soit composé de techniciens ou qu’il tente une Union nationale. Le président de la République serait alors contraint à la démission ; et on entrerait dans une campagne présidentielle, qui se jouerait à l’intérieur de la droite. La gauche serait écartée du pouvoir pour longtemps. Très longtemps.
Pendant ces longs mois de désordre, la France ne serait pas gouvernée ; aucune réforme ne serait mise en œuvre. Les déficits s’aggraveraient. Les remèdes ensuite nécessaires seraient bien plus sévères encore, si tant est qu’ils soient alors encore possibles.
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Il n’empêche : la crise de régime, avant la fin du mandat de l’actuel président, est une hypothèse très réaliste, dans un pays où le suicide politique semble devenu un sport national.
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