Démocratie directe : l’assemblée du peuple réuni prend les décisions. Trois ou quatre exemples lointains ou plus proches : Athènes dans l’Antiquité (en réalité c’est une pseudo-démocratie : seuls participaient aux affaires de la cité les « hommes libres » ; esclaves, étrangers, femmes étaient exclus). Les sections de quartier dans la Commune du Paris révolutionnaire de 1792, puis de 1871 (ce dernier cas magnifiquement analysé par Marx dans
La Guerre civile en France) . Les soviets au début de la révolution russe.
Deux cas différents. D’une part, une démocratie directe institutionnalisée, celle d’Athènes, où les pouvoirs législatif et judiciaire sont exercés par les citoyens rassemblées, tandis que l’exécutif est formé de magistrats élus (pour certains par tirage au sort pour une durée d’un an !) (peuple au sens n°1). D’autre part, une démocratie directe dans un moment de vide institutionnel, au cours d’une période de bouleversement : les Comités révolutionnaires, acteurs d’une période de changement dans un moment d’intermède juridique, exerçant un pouvoir local, mais capable de se coaliser en Congrès des délégués (peuple au sens n°2).
Ajoutons : le référendum, cas de démocratie directe sur lequel il faudra revenir ; l’autogestion, démocratie directe dans le domaine économique.
Ce qu’il y a de formidable dans une démocratie directe intégrale, c’est que le « pouvoir du peuple », se confond avec son exercice effectif ; son danger, c’est qu’il n’y a « pas de pouvoir pour arrêter le pouvoir » (Montesquieu), pas de « séparation des pouvoirs » qui puisse jouer le rôle de modérateur, puisque, précisément, tous les pouvoirs sont un. Ne faisons pas d’angélisme en sacralisant le peuple : rien ne permet d’affirmer
a priori qu’un peuple assemblé prendra la décision optimale, ne sera pas victime de manipulation, ne cèdera pas à la démagogie populiste ou à l’obsession sécuritaire, voire n’approuvera pas un processus excluant une minorité. La démocratie n’est pas totalement immunisée contre un moment despotique. Il faut donc maintenir la référence à un « sur-droit » (droits de l’homme, énoncé égalitaire, priorité de la liberté, principe d’une Constitution républicaine...)
Mais la limite de la démocratie directe, c’est qu’elle n’est concevable que pour de petits groupes humains - d’où l’existence du système représentatif.
Démocratie participative. Pléonasme ? Il s’agit pour le peuple de
prendre part au pouvoir qui est pourtant déjà par principe entièrement le sien ! Cela nous montre simplement qu’il faut toujours s’emparer d’un droit pour le rendre effectif, faute de quoi d’autres le prennent à notre place.
La démocratie participative, c’est donc une expérience de démocratie active (sans la médiation passive de la représentation), directe (le peuple s’assemble), locale (pour traiter d’affaires proches, dans lesquelles chacun est impliqué et dont il a une connaissance immédiate) avec un pouvoir de décision (concernant, par exemple, la répartition d’un montant limité du budget municipal) et dans laquelle
pas un n’est laissé pour compte.
L’exercice du pouvoir local participatif est donc mixte, partagé entre un élément indirect représentatif (les élus municipaux), un élément direct (les habitants des quartiers) et un élément semi-direct (les délégués de base mandatés et révocables).
La référence, c’est celle d’une expérience démarrée au Brésil à Porto-Alegre en 1989 (décrite dans l’article «
Comment démocratiser radicalement la démocratie ? »), puis étendue à d’autres villes et dans différents pays. Ces expériences ont été mises en en réseau par
Démocratiser radicalement la démocratie.
Des morceaux d’utopie se réalisent ici ou là... épars et fragiles... mais signes d’espoir pour la démocratie. C’est ça, le peuple en marche pour (re)trouver son pouvoir (perdu ?)
Prochain article, passage aux travaux pratiques, tout près de chez nous :
Démocratie participative. L’expérience d’Arcueil : (1) les assemblées de quartier, mode d’emploi.
Ecrit par Etienne Lang