pierre30 a écrit : ↑28 sept. 2022, 16:51:37
@johanono A propos des droits subjectifs dont tu parles, tu nous debales des considérations qui t'appartiennent et que tu associes à la CEDH. Il n'y a rien à débattre.
Il me semble avoir fourni plusieurs exemples assez précis de la jurisprudence de la CEDH. Il me semble qu'en effet, la CEDH se livre à une interprétation très libre et très subjective de certains principes généraux contenus dans la Convention. Ce faisant, elle se permet de trancher des problèmes de société importants, et je pense qu'il n'appartient pas à des juges non élus de trancher ces problèmes de société hors de tout débat démocratique.
Au nom des droits de l'homme, il faudrait donc, par exemple, sacraliser le droit à l'avortement, reconnaître le mariage gay, accueillir la misère du monde au nom du droit d'asile, reconnaître de nouvelles formes de famille ou rapatrier nos sympathiques djihadistes ? Non, la Convention ne dit pas tout ça ! C'est bien par une interprétation très libre du concept de "droit à une vie familiale normale" que la Cour est amenée à pondre cette jurisprudence.
Alors si ces problématiques te semblent anodines, et si ça ne te choque pas que de tels problèmes de société soient tranchés par des juges non élus pour ça, alors effectivement il n'y a rien à débattre...
Camille a écrit : ↑29 sept. 2022, 09:46:52
Johanono : les juges interprètent trop, il faut en finir avec ce gouvernement des juges !!
Le même Johanono : stop à l'inflation législative, il faut en finir avec ces lois sur tout et n'importe quoi !!
Bref, inutile de tourner autour du pot,
@johanono, tu as le droit de camper sur tes positions conservatrices, mais ne dis pas que le juge ou le législateur outrepasse ses fonctions quand une décision ne te plait pas. On a eu la même discussion à propos du Conseil Constitutionnel.
Effectivement, la problématique est à peu près la même avec le CC.
Et mon propos n'est pas contradictoire.
Si certains juges interprètent trop, c'est parce que les traités/lois/constitutions/conventions qu'ils sont chargés d'interpréter leur offrent cette possibilité, en énonçant des principes très généraux et subjectifs.
En dénonçant la Convention européenne des droits de l'homme, on retire aux juges de la Cour la possibilité d'interpréter ce texte et donc de trancher des questions de société (en tout cas, pour notre pays, les autres pays font ce qu'ils veulent).
De même, en retirant de notre Constitution la Charte de l'environnement et la référence au préambule de la Constitution de 1946, pour ne conserver que la référence à la DDHC, on retire au CC la possibilité de censurer des textes de loi sur le fondement d'une interprétation très libre de ces textes.
Et je maintiens que, dans certains cas, les juges outrepassent leurs compétences. J'ai fourni plusieurs exemples. On pourrait aussi évoquer la question du droit à l'avortement aux États-Unis.
De façon générale, nous avons dans notre pays beaucoup de lois (inflation normative), mais des textes souvent imprécis et contradictoires, qui atteignent rarement leur objectif. Plein de normes, avec des principes, des exceptions, des exceptions aux exceptions, etc. Autant d'ingrédients qui pourrissent la vie des gens tout en créant une insécurité juridique. Je souhaite moins de textes, mais plus précis, mieux rédigés.
Prenons un exemple que j'ai déjà évoqué sur ce forum : celui de la laïcité. Il y a dans notre société plusieurs conceptions différentes de la laïcité. Nous avons dans notre corpus juridique des chartes, des circulaires, des recommandations, mais rien qui ne permette vraiment de trancher ce débat sur la laïcité, si bien que les fonctionnaires chargés d'appliquer cette laïcité sur le terrain se trouvent désemparés, à tel point, par exemple, que de nouveaux problèmes ont surgi récemment dans certains établissements (lire
ICI).
Autre exemple : le droit du travail. Nous avons un Code du travail qui comporte aujourd'hui plusieurs milliers de pages, qui ne cesse de grossir chaque année. Cela pourrit la vie des entrepreneurs. Et les travailleurs sont-ils vraiment mieux protégés que dans des pays où le Code du travail est moins touffu ? Cela reste à prouver. En attendant, cette complexité fait le bonheur des avocats et juristes spécialisés.
Autre exemple : le droit de l'urbanisme, également très complexe et très contraignant, à telle point qu'une commune ou un promoteur ayant un petit projet dépense aujourd'hui davantage d'argent pour faire des consultations ou des rapports prévus par la loi que pour faire les travaux proprement dits. Et pourtant, cette complexité n'empêche pas vraiment l'urbanisation anarchique et l'enlaidissement du pays. Donc cette complexité pourrit la vie des gens sans atteindre son objectif... Il y a un problème quelque part...
Moins de normes, moins de chartes, moins de bavardage législatif, mais des textes plus précis et mieux rédigés : est-ce si compliqué à comprendre, et à mettre en place ?