Compte rendu de lecture "Décadence" de Michel Onfray

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Baltorupec
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Compte rendu de lecture "Décadence" de Michel Onfray

Message non lu par Baltorupec » 18 avr. 2017, 11:32:04

Bonjour,

j'ai fini de lire le livre de Michel Onfray. C'est un livre de 600 pages bien écrit, bien documenté.

Mon avis général :
Même si on adhère pas aux thèses de Michel Onfray, c'est un livre qui vaut le coup d'être lu. Comme je l'ai dit, il est bien écrit et surtout bien documenté. On peut être en désaccord et apprendre tout de même des choses.

Ma lecture a été un peu gâché par le fait que Michel Onfray utilise constamment le mot "ontologique" ou "ontologie". Une définition :
ontologie, branche de la métaphysique concernant l'étude de l'être, objet ou sujet, réalité, existence, durée, évolution ; personne dans sa sensibilité intime.
Les philosophes classent les ontologies de diverses façons à l'aide de critères tels que le degré d'abstraction et le champ d'application1:

Ontologie de base (en) : concept sur lequel le développement de tous les autres pourrait s'appuyer.
Ontologie de domaine (le plus souvent rencontré) : décrit un champ de connaissance ou répond à des objectifs particuliers. Par exemple : dans les technologies de l'information, les langages naturels ou les domaines scientifiques.
Ontologie d'interface : relie différents domaines de spécialités entre eux.
Ontologie de processus : décrit les modalités de transformations ou évolutions à travers les entrées, sorties, contraintes à travers le temps. Par exemple : pour les mouvements financiers, les réactions physiques ou cognitives.
Néanmoins le terme reste pour moi assez vague.

Dans sa structure :
Après l'introduction, le livre commence par expliquer pour M.Onfray ne pense pas que Jésus ait existé en tant que personnage historique et qu'il s'agit plutôt d'une cristalisation des concepts déjà émis dans l'ancien testament.
Il explique ensuite les rôles majeurs de Saint Paul puis de Constantin, et explique ainsi comment on est passé du Jésus "dieu est amour" "pardonnez" à la religion mortifère (la vénération du corps torturé du christ) et guerrière. Il présente Saint Paul en homme aigri, violent, et Constantin en politique doué mais violent, qui instrumentalise la religion chrétienne. Une nouvelle fois, ce ne sont pas des affirmations qui sont posées gratuitement mais qui sont étayées.
Il montre bien que dès Saint Paul et Constantin, le christianisme dégénère dans sa version ultra violente et intolérante. Dès Saint Paul et Constantin, des autodafés sont organisés pour brûler les manuscrits des philosophes antiques que Saint Paul admit haïr. Ainsi meurt l'antiquité dans les autodafés du christianisme.

Ensuite, il va décrire le règne du totalitarisme chrétien à travers l'inquisition et la chasse au sorcière.
Le développement aussi d'une philosophie non plus pratique comme était celle de Sénèque, Epicure ou Epictète, mais qui s'agit de toujours de plus de spéculation dans les idées, toujours plus de spéculation dans l'abstraction et montre comme un certains nombre de philosophes comme Gilles Deleuze en sont héritier.

Il entrecoupe son récit par un "intermède" sur l'islam en décrivant l'épopée sanguinaire de Mahomet.

Puis il décrit la fissuration du christianisme, première à travers le Hussisme, et sa deuxième "réplique", le protestantisme.

Il décrit les apports là dedans du très pratique Montaigne, de la Boétie et du prêtre athée Meslier.

Il s'attaque à la révolution française qu'il décrit comme la matrice idéologique de tout les totalitarismes du XXème siècle. Il présente les leaders de la révolution comme étant plein de rancoeurs, et combat en brèche l'idée que l'Histoire est une successions d'évènements dépersonnalisé, mais qu'il faut s'intéresser à l'histoire et la psychologie de ceux qui la crée. Il décrit aussi le génocide vendéen et explique pourquoi c'est effectivement un génocide.

Il critique le marxisme, qu'il compare au christianisme et affirme que le christianisme est en effet une pure production de l'esprit chrétien. Le prolétaire loué par Marx est une pure construction mentale comme l'est Jésus, l'homme qui ne mange pas, n'aime pas, ne défèque pas.

Il s'attaque ensuite aux totalitarismes du XXème sicèle qu'il considère comme les faces d'une même pièce. Le communisme n'est pour lui que le "gant retourné" du fascisme et du nazisme. Il précise les liens étroits entre fascisme, nazisme et christianisme, le soutien inconditionnel de Pie XII à ces idéologies même si il précise que les nazis et les fascistes souhaitaient d'avantage nazifier/fasciser le christianisme que christianiser le fascisme. Néanmoins, il montre qu'Hitler contrairement à Himmler était bien chrétien et non athée ou païens comme le prétende beaucoup.

Pour finir, il fustige mai 68, qu'il décrit comme moment de nihilisme pur. Si il ne soutiens pas le christianisme, il explique que Mai 68 fut un moment de négation de toutes les valeurs chrétiennes, mais surtout qu'il ne prônait aucune valeur morale nouvelle.
Il fustige aussi la pédophilie de certains acteurs de mai 68, preuves à l'appui.

Il critique le relativisme et les acteurs de la french theory. Il critique cette attitude qu'on certaines personne de gôche de prétendre que le réel n'a pas eu lieu.

Enfin il décrit la montée d'Al Qaida. Pour lui, Vatican II est à la fois un moment merveilleux dans la justesse d'une partie des valeurs prônées, mais il considère qu'il tue le catholicisme en même temps.

L'islam plus violent est à son sens destiné à dominer avant de décliner à son tour, tué par sa propre violence interne. Pour lui, les pacifistes sont destinés à être oubliés et les violents à dominer.

Je continuerais mon compte rendu un peu plus tard.
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karoline
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Re: Compte rendu de lecture "Décadence" de Michel Onfray

Message non lu par karoline » 18 avr. 2017, 12:11:44

Baltorupec a écrit :
18 avr. 2017, 11:32:04


Dans sa structure :
Après l'introduction, le livre commence par expliquer pour M.Onfray ne pense pas que Jésus ait existé en tant que personnage historique et qu'il s'agit plutôt d'une cristalisation des concepts déjà émis dans l'ancien testament.
Il explique ensuite les rôles majeurs de Saint Paul puis de Constantin, et explique ainsi comment on est passé du Jésus "dieu est amour" "pardonnez" à la religion mortifère (la vénération du corps torturé du christ) et guerrière. Il présente Saint Paul en homme aigri, violent, et Constantin en politique doué mais violent, qui instrumentalise la religion chrétienne. Une nouvelle fois, ce ne sont pas des affirmations qui sont posées gratuitement mais qui sont étayées.
Il montre bien que dès Saint Paul et Constantin, le christianisme dégénère dans sa version ultra violente et intolérante. Dès Saint Paul et Constantin, des autodafés sont organisés pour brûler les manuscrits des philosophes antiques que Saint Paul admit haïr. Ainsi meurt l'antiquité dans les autodafés du christianisme.
Le Christianisme a été utilisé déjà dès les premiers siècles de son existence par les Romains pour des manipulations politiques. Mais cela n'est pas une raison d'en rejeter ses bienfaits et progrès humanitaires!

Je pense que Michel Onfray a un grand mérite: d'obliger ses contemporains à réfléchir sur le passé qui nous a programmés à jouer un rôle dans la société et d'accepter ce rôle sans se poser de questions.

Personnellement je crois dans l'existence du Christ; je pense que Jésus était celui qui a su convaincre par son attitude et son discours pacifique et parfois fantasmagorique, être le seul messie qu'on attendait, parmi les nombreux autres et comme le peuple ne demandait que cela, et l'imagination du peuple a fait le reste à la suite.........

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Maltavia
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Re: Compte rendu de lecture "Décadence" de Michel Onfray

Message non lu par Maltavia » 18 avr. 2017, 13:05:07

Baltorupec a écrit :
18 avr. 2017, 11:32:04
Il explique ensuite les rôles majeurs de Saint Paul puis de Constantin, et explique ainsi comment on est passé du Jésus "dieu est amour" "pardonnez" à la religion mortifère (la vénération du corps torturé du christ) et guerrière. Il présente Saint Paul en homme aigri, violent, et Constantin en politique doué mais violent, qui instrumentalise la religion chrétienne. Une nouvelle fois, ce ne sont pas des affirmations qui sont posées gratuitement mais qui sont étayées.
Il montre bien que dès Saint Paul et Constantin, le christianisme dégénère dans sa version ultra violente et intolérante. Dès Saint Paul et Constantin, des autodafés sont organisés pour brûler les manuscrits des philosophes antiques que Saint Paul admit haïr. Ainsi meurt l'antiquité dans les autodafés du christianisme.

Ensuite, il va décrire le règne du totalitarisme chrétien à travers l'inquisition et la chasse au sorcière.
Le développement aussi d'une philosophie non plus pratique comme était celle de Sénèque, Epicure ou Epictète, mais qui s'agit de toujours de plus de spéculation dans les idées, toujours plus de spéculation dans l'abstraction et montre comme un certains nombre de philosophes comme Gilles Deleuze en sont héritier.
J'aimerais bien savoir comment il étaye ça...
Déjà sur le christianisme en lui-même, il choisit un peu ce qu'il veut. Il y a à boire et à manger, c'est une sorte de mensonge par omission : il choisit de prendre Saint Paul, mais en revanche il a l'air d'oublier de parler de Ambroise (qui récuse la violence au point qu'il force Théodose à faire pénitence pour le massacre de Thessalonique (donc paye ta dimension violente du christianisme)), d'Origène et de Saint Augustin. Et ça rien que pour la partie antiquité (sans compter qu'Augustin, par exemple avait lu les auteurs antiques (dans l'Empire romain d'Occident et au IVe-Ve siècle donc bien après Constantin et Saint Paul : efficace l'autodafé)).

Sur la question de la philosophie pratique. A ce que je sache, ce ne sont pas les chrétiens qui ont inventé la rhétorique (qui est tout sauf "pratique"), ensuite de nombreux antiques n'avait pas de philosophie "pratique" : je pense aux cyniques et aux stoïciens (grecs, pas latins). Et chez les chrétiens on a aussi des pratiques : Augustin et d'Aquin par exemple.
Et après ils sont nombreux : Isidore de Séville, Alcuin, Jonas d'Orléans et Agobart de Lyon, Hildebrand (futur Grégoire VII, tout ce qu'il y a de plus pratique), Saint Bernard. On en est au XIe siècle, après ils sont de plus en plus nombreux...

Tu pourrais nous dire comment il explique cette partie là ?
Les communautés ne comprennent jamais leur bien, car le nombre des fous y est plus grand que celui des sages.
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Cheshire cat
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Re: Compte rendu de lecture "Décadence" de Michel Onfray

Message non lu par Cheshire cat » 18 avr. 2017, 13:20:38

Onfray a changé de cheval de bataille depuis; maintenant, c'est province contre capitale.
Il n'a pas l'intention de voter.
Pourquoi-pas Lassalle ?
“On commence par se tromper soi-même ; et ensuite on trompe les autres. ”
Oscar Wilde

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Baltorupec
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Re: Compte rendu de lecture "Décadence" de Michel Onfray

Message non lu par Baltorupec » 18 avr. 2017, 14:00:38

J'aimerais bien savoir comment il étaye ça...
Déjà sur le christianisme en lui-même, il choisit un peu ce qu'il veut. Il y a à boire et à manger, c'est une sorte de mensonge par omission : il choisit de prendre Saint Paul, mais en revanche il a l'air d'oublier de parler de Ambroise (qui récuse la violence au point qu'il force Théodose à faire pénitence pour le massacre de Thessalonique (donc paye ta dimension violente du christianisme)), d'Origène et de Saint Augustin. Et ça rien que pour la partie antiquité (sans compter qu'Augustin, par exemple avait lu les auteurs antiques (dans l'Empire romain d'Occident et au IVe-Ve siècle donc bien après Constantin et Saint Paul : efficace l'autodafé)).
@Maltavia @karoline Tu pointes un des défauts de l'ouvrage. Onfray se concentre sur la négativité. Onfray se définit comme tragique, je le pense fataliste. Je suis très peu convaincu par sa définition du tragique, "voir le monde tel qu'il est", je suis profondément subjectiviste, et je ne crois pas que ça soit possible.

Pour moi parmi les défauts de l'ouvrage, c'en est un : ne pas parler des premières abolitions de l'esclavage. Celle de 1315 en France, mais qui est celle définitive sur le sol métropolitain, car d'autres souverains chrétiens vont prendre des mesures anti esclavagisme. Cette abolition de l'esclavage va conduire à une situation inédite dans l'histoire. Entre 1500 et 1880, on va avoir des états esclavagistes, mais l'esclavage est interdit en métropole. Les esclaves sont donc cachés de la population principale.
ensuite de nombreux antiques n'avait pas de philosophie "pratique" : je pense aux cyniques et aux stoïciens (grecs, pas latins).

Le stoïcisme et le cynisme sont pour moi des philosophies pratiques. En effet, ces deux philosophies se concentrent principalement sur comment vivre sa vie ? Comment gérer les biens matériels ? Dépasser la douleur d'une perte ?
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Maltavia
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Re: Compte rendu de lecture "Décadence" de Michel Onfray

Message non lu par Maltavia » 18 avr. 2017, 14:39:39

Baltorupec a écrit :
18 avr. 2017, 14:00:38
Le stoïcisme et le cynisme sont pour moi des philosophies pratiques. En effet, ces deux philosophies se concentrent principalement sur comment vivre sa vie ? Comment gérer les biens matériels ? Dépasser la douleur d'une perte ?
Ca dépend de ce que tu nommes pratique.
Autant j'apprécie énormément le stoïcisme latin, autant le stoïcisme grec qui se limite à : "j'ai l'intuition qu'il existe un ordre cosmique, et il faut que je m'inscrive dans cet ordre universel. Pour ça : il me faut faire preuve d'apathie". Pas très abouti à mes yeux et par extension pas "pratique".
Pour ce qui est du cynisme, je n'ai lu nulle part quelle est la "constitution" qui régirait l'univers et qu'il s'agit de suivre plutôt que les lois de la cité (mais c'est peut être par défaut de recherches). Ou alors elle se limite à : limiter ses besoins, maîtriser ses désirs. On va pas très loin en terme de pratique avec ça il me semble.

En fait c'est qu'à mes yeux une philosophie pratique pousse loin sa doctrine et ne se limite pas à une maxime.
Mais il est vrai qu'en écrivant ça je ne suis pas convaincu par ce que je dis puisque la règle d'or « Ne fais pas à autrui ce que tu penses déraisonnable qu'autrui te fasse » semble constituer à elle seule une philosophie pratique, même si ça reste peu abouti
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Re: Compte rendu de lecture "Décadence" de Michel Onfray

Message non lu par Baltorupec » 18 avr. 2017, 15:02:26

Honnêtement, j'ai juste lu les auteurs stoïques latins, donc je peux peu faire de comparaison.
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racaille
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Re: Compte rendu de lecture "Décadence" de Michel Onfray

Message non lu par racaille » 22 avr. 2017, 00:33:07

Baltorupec a écrit :
18 avr. 2017, 11:32:04
Après l'introduction, le livre commence par expliquer pour M.Onfray ne pense pas que Jésus ait existé en tant que personnage historique et qu'il s'agit plutôt d'une cristalisation des concepts déjà émis dans l'ancien testament.
Il explique ensuite les rôles majeurs de Saint Paul puis de Constantin, et explique ainsi comment on est passé du Jésus "dieu est amour" "pardonnez" à la religion mortifère (la vénération du corps torturé du christ) et guerrière. Il présente Saint Paul en homme aigri, violent, et Constantin en politique doué mais violent, qui instrumentalise la religion chrétienne. Une nouvelle fois, ce ne sont pas des affirmations qui sont posées gratuitement mais qui sont étayées.
Il montre bien que dès Saint Paul et Constantin, le christianisme dégénère dans sa version ultra violente et intolérante. Dès Saint Paul et Constantin, des autodafés sont organisés pour brûler les manuscrits des philosophes antiques que Saint Paul admit haïr. Ainsi meurt l'antiquité dans les autodafés du christianisme.

Ensuite, il va décrire le règne du totalitarisme chrétien à travers l'inquisition et la chasse au sorcière.
Le développement aussi d'une philosophie non plus pratique comme était celle de Sénèque, Epicure ou Epictète, mais qui s'agit de toujours de plus de spéculation dans les idées, toujours plus de spéculation dans l'abstraction et montre comme un certains nombre de philosophes comme Gilles Deleuze en sont héritier.
Tout d'abord un grand bravo pour le boulot de compte-rendu.

Je n'ai pas lu le livre, par contre j'avais lu à sa sortie son traité d'athéologie et je suis très familier de sa contre-histoire de la philosophie. Même si je diverge de plus en plus avec lui sur plein de sujets, je lui reconnais de m'avoir ouvert à la philo.

J'adhère à son hyper-rationalisme en ce qui concerne Jésus et aussi à son analyse des fondements historiques du christianisme. En fait, sur ces sujets je ne trouve rien à redire.
Et s'il se focalise sur Saint Paul, c'est bien parce que le christianisme est essentiellement paulinien.

Par contre je n'accroche pas du tout à son regret des philosophies pratiques (genre j’utilise les lettres à Menécée pour caler un pied de table). D'abord parce que ce n'est pas vrai, et puis aussi parce que je le soupçonne de calculs utilitaristes assez mesquins. En matière de publication philosophiques il est de nos jours bien plus facile de vendre des bouquins d'éthique pratique du genre "coaching-sagesse" que des trucs nécessitant un peu plus d'investissement en temps et en énergie.

Et puis sont obsession anti-Deleuze confine désormais au pur bashing. Pourtant c'est bien lui qui a écrit Spinoza, philosophie pratique (le chapitre Spinoza et nous n'a absolument rien d'abstrait. Par contre il ne donne pas de mode d'emploi pour un bonheur garanti 100% ou remboursé).
Tiens, j'ai lu récemment que l'armée israélienne utilisait les concepts deleuziens d'espaces lisses et d'espaces striés dans le but d'améliorer leurs dispositifs de contre-insurrection en milieu urbain.
Baltorupec a écrit :
18 avr. 2017, 11:32:04
Il s'attaque à la révolution française qu'il décrit comme la matrice idéologique de tout les totalitarismes du XXème siècle. Il présente les leaders de la révolution comme étant plein de rancoeurs, et combat en brèche l'idée que l'Histoire est une successions d'évènements dépersonnalisé, mais qu'il faut s'intéresser à l'histoire et la psychologie de ceux qui la crée. Il décrit aussi le génocide vendéen et explique pourquoi c'est effectivement un génocide.
Là-dessus, plus sur son girondisme auto-proclamé, il se calque très nettement sur l'historiographie libérale de la Révolution française. Qu'il dise les leaders jacobins complètement fanatiques idéalistes pour qui l'individu est de la chair à idéologie, soit, pourquoi pas, mais faire des girondins le prototype de la fédération anarchiste proudhonienne, je trouve qu'il se touche un peu.
Baltorupec a écrit :
18 avr. 2017, 11:32:04
Il critique le marxisme, qu'il compare au christianisme et affirme que le christianisme est en effet une pure production de l'esprit chrétien. Le prolétaire loué par Marx est une pure construction mentale comme l'est Jésus, l'homme qui ne mange pas, n'aime pas, ne défèque pas.
De plus le marxisme est, comme le christianisme, une téléologie. Tous deux sont aussi post-politiques dans le sens où ils se projettent sur un "arrière-monde" (pour reprendre Onfray) de règlement final de tous les conflits.
Baltorupec a écrit :
18 avr. 2017, 11:32:04
Pour finir, il fustige mai 68, qu'il décrit comme moment de nihilisme pur. Si il ne soutiens pas le christianisme, il explique que Mai 68 fut un moment de négation de toutes les valeurs chrétiennes, mais surtout qu'il ne prônait aucune valeur morale nouvelle.
Il fustige aussi la pédophilie de certains acteurs de mai 68, preuves à l'appui.

Il critique le relativisme et les acteurs de la french theory. Il critique cette attitude qu'on certaines personne de gôche de prétendre que le réel n'a pas eu lieu.
C'est sur ces points qu'on voit le mieux l'évolution d'Onfray. Il faut le réécouter sur mai 68 et sur Deleuze/Guattari/Foucault quand il en parlait il y a encore 10-15 ans. Il n'a pas choppé sa réputation de néo-réactionnaire pour rien.

Mon hypothèse : beaucoup de passions tristes depuis les morts de son père et de sa compagne. Trop de bile noire et de grands crus. Digestion difficile. Solitude de celui qui fléchit indéfiniment sur lui-même.
Ce qui distingue principalement l'ère nouvelle de l'ère ancienne, c'est que le fouet commence à se croire génial. K M

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Re: Compte rendu de lecture "Décadence" de Michel Onfray

Message non lu par Baltorupec » 22 avr. 2017, 10:45:18

Clairement, quand j'entend ou je lis Michel Onfray, je ressens de la tristesse, voir de l'aigreur. Il y a très peu de joie dans son travail, mais surtout de la colère et de la tristesse.

Foucault, il le dézingue aussi pour son soutien à l'Ayatollah Khomeini.

Après, personnellement, je ne suis pas forcément si éloigné que ça de lui sur certains points. J'ai grandi dans un milieu de gauche, ce sont mes valeurs, mais régulièrement, j'en vomis son indiscipline, les manques de respect constant, l'inquisition morale du "c'est pas très charlie", "ça rappelle les heures les plus sombres de notre histoire", le rejet du réel.

Néanmoins, ça m'a donné à la fois envie de lire Gilles Deleuze et le choc des civilisations de Huttington.
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Re: Compte rendu de lecture "Décadence" de Michel Onfray

Message non lu par Baltorupec » 22 avr. 2017, 10:50:24

Après pour son aigreur, au delà de la mort de ses êtres chers, je pense que la campagne de diffamation qu'il a subi lorsqu'il a soutenu le livre noir de la psychanalyse et écrit "le crépuscule d'une idole" lui a fait prendre de plein fouet le visage d'une certaine gauche qui n'hésite pas à diffamer, mentir, insulter une personne pour un livre qu'elle n'a pas lu, campé dans des positions purement idéologique.

Cela a vraiment été une campagne d'une immense violence, où il a été insulté de fasciste, de pédophile, d'antisémite, de vouloir "tuer le père" alors qu'il venait de perdre le sien.

Cette gauche là existe, et elle a visage qui derrière les jolis concepts de tolérance et tout ça n'est pas beau à voir.
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Re: Compte rendu de lecture "Décadence" de Michel Onfray

Message non lu par racaille » 22 avr. 2017, 21:03:40

Oui je me souviens des réactions contre son livre sur Freud. C'était quelque chose !

En fait je me suis "éloigné" de lui surtout parce que j'ai commencé à m'intéresser à d'autres trucs et que Onfray ne travaille pas dessus.
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Re: Compte rendu de lecture "Décadence" de Michel Onfray

Message non lu par El Fredo » 22 avr. 2017, 22:13:18

J'avais lu son "Traité d'athéologie" à l'époque, j'avais bien aimé malgré son abus du terme "ontologie" qui ne l'a visiblement jamais quitté. Et puis j'ai lu "Pour en finir avec Dieu" de Richard Dawkins, et c'est là que j'ai réalisé la faiblesse de sa pensée qui tient plus du pamphlétaire que du philosophe, un Eric Zemmour de l'autre côté du spectre politique en quelque sorte. Son goût de la polémique a achevé de me convaincre.
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Re: Compte rendu de lecture "Décadence" de Michel Onfray

Message non lu par racaille » 22 avr. 2017, 22:23:55

Pareil que toi El Fredo, j'ai lu ces deux bouquins dans le même ordre et j'ai aussi préféré celui de Dawkins en gros pour les mêmes raisons.
Ce qui distingue principalement l'ère nouvelle de l'ère ancienne, c'est que le fouet commence à se croire génial. K M

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Re: Compte rendu de lecture "Décadence" de Michel Onfray

Message non lu par Antichrist » 29 avr. 2017, 21:53:42

onfray n'arrive pas a admettre que
dieu...c'est l'humanité

et que l'humanité n'a pas la meme idéologie que lui...

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Re: Compte rendu de lecture "Décadence" de Michel Onfray

Message non lu par Baltorupec » 29 avr. 2017, 22:02:21

Antichrist a écrit :
29 avr. 2017, 21:53:42
onfray n'arrive pas a admettre que
dieu...c'est l'humanité

et que l'humanité n'a pas la meme idéologie que lui...
Mouais.
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