Commençons par Boris Titov, le candidat de l'économie libérale.
Boris Titov : « Il faut en Russie une vraie stratégie pour un nouveau modèle de croissance »
26 déc. 2017, 13:52:00
L'homme d'affaires Boris Yurievich Titov, qui défend les intérêts des entreprises, est candidat à l'élection présidentielle russe, qui aura lieu en mars 2018. - Ray Tang/Shutterstock/SIPA
Boris Titov, homme d'affaires et « ombudsman » des entrepreneurs auprès du Kremlin, s'est déclaré candidat à la présidentielle de mars prochain.
Quelles sont, selon vous, les réformes les plus urgentes à mener en Russie ?
Il faut d'abord permettre la légalisation de notre économie parallèle, surnommée ici « économie des garages », ateliers et petits commerces vivant en bas des immeubles et à l'ombre des statistiques [5-15 % de la population active dans certaines villes russes, NDLR]. Assurons des conditions favorables à ces micro-entreprises individuelles. La deuxième réforme vise le système judiciaire qui, dans notre pays encore trop aux mains des fonctionnaires, est souvent utilisé contre les entrepreneurs. Ils sont 5.000 en prison préventive attendant leur jugement sur des affaires économiques - plus en 2017 qu'en 2016 malgré les efforts pour réduire cette pression. C'est d'autant plus inquiétant que, dans nos tribunaux, le taux de condamnation est de 99,08 %... Enfin, il faut une vraie stratégie pour un nouveau modèle de croissance. Loin de la manne pétrolière et de la politique de rigueur actuelle ! C'est une réforme de système.
En dix-huit ans au pouvoir, pourquoi Vladimir Poutine n'a-t-il pas mené ces réformes ?
Son objectif principal est la stabilité du pays. Il a réussi car, jusque-là, le modèle pétrolier fonctionnait bien : les cours élevés du baril garantissaient un flux continu de revenus d'exportations, l'économie se développait, les salaires augmentaient, le niveau de vie progressait. Mais le contexte a changé. Après la baisse du prix du pétrole, la Russie vit dans la stagnation. Nous ne sortirons pas de ce mouvement vers le bas si nous ne lançons pas des politiques gouvernementales de stimulation de l'économie.
Pourquoi participez-vous à ce scrutin ?
J'espère obtenir, comme l'homme d'affaires Mikhaïl Prokhorov en 2012, près de 8 % des voix. Je suis candidat, mais sûr de ne pas être élu. Vladimir Poutine bénéficie d'un énorme soutien populaire. La campagne électorale donne toutefois l'occasion de parler des changements nécessaires pour sortir l'économie de ses difficultés. Et nous espérons influencer la future politique du Kremlin. Poutine a de bonnes oreilles et, au-delà des cercles du pouvoir, écoute ce que les gens lui disent. Avec mes équipes, nous sommes prêts à créer une « delivery unit » pour travailler avec lui et son prochain gouvernement. Nous avons déjà obtenu une amnistie pour les entrepreneurs poursuivis en justice. Beaucoup de gens au Kremlin étaient pourtant contre !
Les sanctions occidentales contre Moscou gênent-elles les entrepreneurs ?
Les petites et moyennes entreprises que je représente ne sentent pas les effets des sanctions. Les mesures financières ne nous affectent pas. Et nous travaillons en dehors des secteurs visés par les restrictions sur les transferts de technologie. Nous sentons par contre bien plus les méfaits de la politique de notre banque centrale qui, avec sa priorité donnée à la lutte contre l'inflation, maintient les taux à des niveaux trop élevés. Cette stricte politique financière était jusqu'à peu justifiée. Mais, aujourd'hui, il faut un changement de modèle et... de priorités !
Correspondant à Moscou
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