Donald Tusk va quitter une Pologne émancipée et dynamique pour prendre ses quartiers à Bruxelles. Le premier ministre polonais, âgé de 57 ans, a réussi à faire l'unanimité samedi 30 août parmi les principaux dirigeants de l'UE pour occuper le poste de président du Conseil européen. Il ne parle pas français, très mal anglais, parfaitement allemand. Cela donne une idée assez précise de ses penchants géopolitiques : proximité avec Berlin, plus grand réalisme vis-à-vis des Etats-Unis, et distance polie avec la France.
Un premier ministre usé dans son pays peut-il devenir un président dynamique du Conseil ? Tel est le défi qui se pose à Donald Tusk, à l'heure de prendre la succession d'Herman van Rompuy, dont le manque de charisme et de poids politique a illustré la volonté des capitales de garder la main sur le devenir de l'UE.
Le leader du parti Plateforme civique (PO, centre droit) dirige le gouvernement polonais depuis 2007, après avoir essuyé une défaite à l'élection présidentielle deux ans plus tôt. Pragmatique, opportuniste, rompu à la communication politique, il a résumé son approche des affaires publiques en une expression : son ambition est d'assurer « l'eau chaude dans le robinet ». Pas de quoi soulever l'enthousiasme des nouvelles générations, qui n'ont jamais connu les privations de l'époque communiste, ni celui de la Pologne la plus conservatrice, focalisée sur les questions identitaires.
UN ALLIÉ DU MILIEU DES AFFAIRES
Né à Gdansk, membre du syndicat Solidarité dans les années 1980, Donald Tusk a aussi connu une expérience entrepreneuriale, avec une société de peinture. Il est généralement vu comme un allié du milieu des affaires. M. Tusk croit dans les vertus du libéralisme et de la concurrence, qui ont transformé son pays, sans pour autant se priver des moyens étatiques lorsqu'il s'agit de s'attirer les grâces d'une catégorie particulière.
Il n'a jamais brillé par la sophistication de sa vision européenne, mais c'est sous son autorité que la Varsovie a acquis un poids inédit dans l'UE. Alliant un conservatisme ferme sur le plan religieux et social à un libéralisme décomplexé sur le plan économique, Donald Tusk peut s'enorgueillir d'avoir conduit la Pologne pendant les années les plus spectaculaires de sa mutation. Son pays est le seul à n'avoir jamais connu de véritable ralentissement ni de récession depuis la crise de 2008.
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Au fil des ans, le premier ministre a réussi méthodiquement à écarter tout rival sérieux à l'intérieur de son parti. Mais l'usure du pouvoir et les scandales à répétition – tel celui de mystérieuses écoutes, en juin, concernant certains ministres – pèsent lourd dans l'opinion.
Ils expliquent l'écart dans les sondages en faveur du PiS. Faute d'une alternative crédible au sein de la PO, le départ vers Bruxelles de Donald Tusk pourrait avoir des conséquences dramatiques pour son camp, qui se prépare à la défaite. Or, une alternance pourrait porter atteinte à l'image de la Pologne, élève vertueux des réformes. Il serait assez inouï d'imaginer Jaroslaw Kaczynski, foncièrement antiallemand et antieuropéen, devenir premier ministre, tandis que M. Tusk présiderait le Conseil. Les retrouvailles à Bruxelles seraient glaçantes.
Donald Tusk avait pris l'engagement de conduire la Pologne dans la zone euro. Mais la crise a ralenti les ardeurs de son gouvernement, qui a cessé d'avancer un calendrier précis. En revanche, M. Tusk a beaucoup misé sur les fonds structurels européens : dans le dernier budget quinquennal, la Pologne en était le premier bénéficiaire. Ils lui ont permis de conduire de grands travaux et de moderniser ses infrastructures.
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