Cette pratique, très utilisée par la mafia et l'organisation terroriste d'extrême gauche italienne Les Brigades Rouges, est surnommée «jambisation» par les policiers et magistrats.
«Jambisation». Si le mot est inconnu du grand public, il commence à circuler dans les milieux policiers et judiciaires de Seine-Saint-Denis: «On tire dans les jambes pour mutiler plutôt que de tuer», résume un fonctionnaire qui a récemment vu les règlements de compte de ce type se multiplier entre dealers dans le département. En moins d'un mois, au moins trois cas différents se sont succédé. Le 30 janvier, en pleine nuit, un jeune homme est blessé au niveau du genou à Stains, haut lieu du trafic de drogue. Cinq jours plus tard, un deuxième homme est atteint à la cuisse. «C'est ce qu'on appelle ‘un match aller-retour'», nous confie une source policière du département. Entre-temps, le 1er février, un troisième cas est identifié à Saint-Denis, où un père de famille de 44 ans est touché au pied en pleine journée par un individu à bord d'une voiture.
Les services d'urgences du département ont fait les comptes: sur 113 blessures par armes à feu (suicides, accidents, homicides) répertoriées entre 2013 et 2015, 39 se concentraient sur les membres inférieurs, soit 35% des cas. «C'est un chiffre important», fait remarquer un médecin urgentiste. Et plus on est jeune, plus on se fait tirer dans les jambes: les 18-40 ans sont majoritairement touchés dans les genoux quand les plus de quarante ans sont plus souvent ciblés à la tête. Ce phénomène semble pour l'heure spécifique à la Seine-Saint-Denis. À Marseille, «seuls» huit cas ont été relevés ces deux dernières années, soit 8% des blessures par balles dans le département des Bouches-du-Rhône.
Une pratique ancienne
Pour le criminologue Alain Bauer, ces résultats sont étonnants car la jambisation, à l'époque très utilisée par la mafia et les Brigades Rouges, avait disparu en France. Dans les années 1980-1990, «on avait vu des cas à Marseille et dans la région de Grenoble», se souvient-il. «On ‘jambisait' des politiques, des journalistes, des patrons». Mais les guerres de pouvoir dans les milieux corso-marseillais au milieu des années 2000 avaient fini par faire disparaître les jambisations.
(...)
Des enquêtes plus difficiles à mener
Pour les policiers, ces affaires de jambisation peuvent être un véritable casse-tête. «Dans 80% des cas, il n'y a pas de dépôt de plainte», regrette un policier du 93. «La personne connaît son agresseur mais préfère se taire. Soit parce qu'elle craint des représailles, soit parce qu'elle préfère se faire justice elle-même». De quoi ralentir l'identification du ou des auteurs.
Pour l'heure, aucune étude ne s'est encore penchée sur le sujet. Le phénomène resterait à ce stade très marginal. Président du Samu-Urgences de France, le Dr François Braun a interrogé tous les services d'urgences de France.
(...)
http://www.lefigaro.fr/actualite-france ... -denis.php
Qu'en pensez vous ?