J'ai entendu Zemmour parler de ça avec BHL dans l'émission « Zemmour et Naulleau » sur Paris-Première. Il évoquait un passage de « Choses vues » de Victor Hugo qui avait rapporté une conversation qu'il avait eue avec Bugeaud en janvier 1841. Bugeaud disait que la conquête de l'Algérie était une erreur, Victor Hugo pensait le contraire. Cinq ans plus tard [en 1846] Bugeaud s'était rendu à l'avis de VH.merlin a écrit : ↑11 oct. 2021, 11:49:15Vous vous rappelez pas la polémique d'il y a quelques mois quand zeimour faisait l'apologie du général bugeaud, le conquérant sanglant de l'algérie qui ne rechignait pas à tuer femmes et enfants pour soumettre les algériens ....
Je trouve vraiment indécent de parler de ce pantin digne des pires moments de notre histoire ...
J'ai retrouvé le passage où Victor Hugo raconte cette conversation avec Bugeaud :
En conclusion, il est difficile de juger avec nos yeux d'aujourd'hui la colonisation de l'Algérie au XIXème siècle. A l'époque, on pouvait s'illusionner sur la capacité de la France à apporter le développement, exactement comme on s'illusionne aujourd'hui sur la capacité de l'Occident à apporter des valeurs démocratiques à l'Irak, la Syrie ou l'Afghanistan.Bugeaud était alors un homme de soixante-cinq ans, vigoureux, très coloré de visage, marqué de petite vérole. Il avait une certaine brusquerie qui n’était jamais de la grossièreté. C’était un paysan mélangé de l’homme du monde, fruste et rempli d’aisance, — n’ayant rien de la lourdeur de la culotte de peau, — spirituel et galant.
Mme de Girardin mit le général à sa droite et V. H. à sa gauche. La conversation s’établit entre le poète et le troupier, Mme de Girardin servant de truchement.
Le général était en grande humeur contre l’Algérie. Il prétendait que cette conquête empêchait la France de parler haut à l’Europe ; que, du reste, rien n’était plus facile à conquérir que l’Algérie, qu’on y pouvait sans peine bloquer les troupes, qu’elles seraient prises ainsi que des rats et qu’on n’en ferait qu’une bouchée ; — qu’en outre, il était très difficile de coloniser l’Algérie ; que le sol était improductif : il avait inspecté les terrains lui-même, et il avait constaté qu’il y avait un pied et demi de distance entre chaque tige de blé.
- Comment ! dit V. H., voilà ce qu’est devenu ce que l’on appelait le grenier des romains ! Mais, en serait-il ce que vous dites, je crois que notre nouvelle conquête est chose heureuse et grande. C’est la civilisation qui marche sur la barbarie. C’est un peuple éclairé qui va trouver un peuple dans la nuit. Nous sommes les grecs du monde, c’est à nous d’illuminer le monde. Notre mission s’accomplit, je ne chante qu’hosanna. Vous pensez autrement que moi, c’est tout simple. Vous parlez en soldat, en homme d’action. Moi je parle en philosophe et en penseur[1].
[1]En 1846 — cinq ans après — l’opinion de Bugeaud était entièrement changée. Il vint trouver Victor Hugo, alors pair de France, pour le prier de parler dans la question du budget. Bugeaud dit qu’après expérience il avait acquis la conviction que l’annexion de l’Algérie à la France avait d’excellents côtés, qu’il avait trouvé un système de colonisation applicable, qu’il peuplait la Mitidja, grand plateau au milieu de l’Afrique, de colons civils, qu’à côté il éléverait une colonie de troupes. Il prit pour comparaison une lance : — le manche serait un civil, la flèche la troupe ; de façon à ce que les deux colonies se touchassent sans se mêler, etc., etc. — En résumé, le général Bugeaud, que l’Afrique avait fait maréchal et duc d’Isly, était devenu très favorable à l’Afrique. (Note de Victor Hugo.)